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poésie

  • la dépression

    c’est cela la dépression de grandes enseignes des couleurs vives

    mais plus on va plus on regrette plus on oublie

    au sol de grands carreaux blancs

    des  murs vitrés on voit tout rien n’est caché

    des hommes seuls devant des congélateurs

    au plafond des tuyaux des gaines

    menuiseries métalliques apparentes des fils

    il fait sombre une prison avec

    des boîtes et des étiquettes sous la lumière jaune

    qu’avons nous fait pour être punis ainsi



    © lacalavera

     

  • Voix Off

    Le poète tunisien Moncef Louhaïbi, né en 1949, est professeur de la littérature arabe à l’Université de Kairouan. Il est l'auteur de "Tables", du "Manuscrit de Tombouctou" et de " Les affaires de la femme qui a oublié de grandir" (Ed. Dar Al Maha, Tunis, 2010), tous non traduits à ce jour.

    J'ai lu le texte ci-dessous sur le site Poezibao de Florence Trocmé et il m'a ému. J'ai pensé au long poème de Vinicius de Moraes "dia da criacao"...

     

    Exercice d'écriture du vendredi 14 janvier 2011


     
    Que toute chose se taise ici, ce vendredi :
    le frémissement des oiseaux, à l'aube de la Tunisie verte,
    ses cloches qui sonnent depuis un arc-en-ciel,
    ses arbres qui chantent.
    Que toute chose se taise :
    les sons des téléphones, le bruit des pioches.
    Que toute chose se taise ce vendredi :
    les femmes pleurant notre voisin qui agonise
    ce vendredi
    les rires des belles filles qui accourent sous la
    pluie fine, vers l'école,
    ce vendredi
     
    Que la pluie cesse de tomber
    ce vendredi
    Qu'elle accroche ses cloches de cristal
    dans l'air et dans les nuages
    Qu'elle attende
    que 17h sonne
    Après, elle aura droit à tomber avec abondance
    Que notre voisin reporte sa mort jusqu'à 17h
     
     
    Que toute chose se taise
    ce vendredi :
    cette femme qui appelle tantôt son fils
    tantôt son chien
    Qu'elle soit comme le chien
    Lui qui dresse ses oreilles
    Pressentant ce que nous les bergers, ne pressentons jamais
     
     
    Que toute chose se taise
    ce vendredi
    le tintement de leurs verres
    le chuchotement de leurs bouteilles
    dans Al-Mazar
    Dis-leur :
    vous qui traversez la terrasse du jour
    vers un bar qui ouvre le vendredi
    un peu de silence
    ce n'est rien
    et attendez
    que 17h sonne
     
     
    Que toute chose se taise ce vendredi :
    les chansons des bergers
    l'appel à la prière
    dis-leur
    ne faites pas la prière
    ce vendredi
    ne lisez pas la Fatiha (*)
    levez-vous comme les Tunisiennes et les Tunisiens
    en ce vendredi
    Que vous psalmodiez : louange au peuple
    notre seigneur à nous tous
    Que vous psalmodiez : louange au soleil
    que le peuple fait rouler en ses mains
    Que vous psalmodiez : louange à la terre
    que le peuple entoure
    et fait tourner dans ses mains
     
     
    Que toute chose se taise
    ce vendredi :
    les élèves
    même s'ils chantent :
    "Si le peuple veut un jour la vie
    le destin se doit de répondre"
    Dis-leur
    ne saluez pas le drapeau
    ce vendredi
    il y a une voix qui vient
    une voix qui illumine
    pour nous apprendre
    et apprendre ce crayon
     
     
    Un peu de silence
    toi vent
    toi pluie
    toi orage
    Un peu de silence
    vous véhicules et trains
    qui partez depuis le matin
    Que toute chose ici et là se taise :
    Les caravanes de chameaux et de chiens
    qui traversent le Sahara de Douz
    Les bateaux, allant et venant
    en Méditerranée
    hissant des voiles
    déployant des filets
    Les phares qui éclairent
    à travers le gypse du brouillard
     
     
    Que toute chose se taise :
    Les pirates
    Le piétinement des rames
    Le reflux sur la côte tunisienne
     
     
    Un peu de silence
    mes frères
    mes camarades que j'aime
    Que toute chose ici et là
    se taise maintenant
    17h sonne
    Que nous soyons tout oreille
    Ici tout est silencieux
    Vous n'entendez rien?
    Mais si, écoutez bien
    C'est le bruit de ses bottes
    Le despote
    qui s'enfuit
    qui part
    en hâte
    qui traîne ses pas lourdement
    vers l'endroit où
    il s'endormira
    dans un cadavre vide  
     
    Moncef Louhaïbi

    (version française de l’arabe par l’auteur)
     

    (*) la première sourate du Coran 

     

    Merci à Poezibao, l'énorme site de Florence Trocmé  !

  • bénédiction

     

     

    La vierge bleue domine les usines de
    la ville vous n’en saurez rien cela reste mon secret
    sa tête est légèrement penchée
    on dirait qu’elle dort mais
    ses yeux sont grands ouverts
    et les ouvriers sont bénis
    et le chômage est béni
    et les patrons sont bénis
    bénis aussi sont les actionnaires
    les traders et aussi les camions
    la ronde des camions
    le sang du grand Marché
    et bénis sont les produits
    et bénis par anticipation tous les consommateurs
    et les caddys remplis et toutes les cartes de réduction
    le moral des entreprises la santé des ménages
    la couleur des indicateurs toutes ces fleurs

     

     

     

     

    © lacalavera "La douleur des oiseaux"