elles arrivaient avec leurs visages neufs
lisses comme une image de magazine
la broyeuse a besoin de corps,
elles allaient s’user, se retrouver un beau jour avec du bleu sous les yeux et des jambes lourdes
les miennes me portaient bien, merci, j’étais déjà un vieux chien, j’demandais plus ma route.
à force d’attendre
on s’étend dans toutes les directions, on déborde
et le moindre contact fait vibrer les cils.
cela ne s’était pas arrangé depuis mon dernier passage,
les filets de pisse et les traces des hommes qui avaient passé la nuit dehors
bouteilles de vin et préservatifs
boîtes de Néocodion trouvées mortes en plusieurs endroits de la piste
et les camés tournaient, papillons lâchés au grand jour
et partout des immeubles avaient surgi comme des monolithes
les halls d’entrée abritaient des jardins, des statues, de la musique,
elles y entraient avec leurs visages de magazine.
leurs jambes happées par les vitres teintées puis
on entendait glisser les icônes sur l’écran des navigateurs
des cars de touristes passaient au ralenti, leurs yeux collés au verre Sécurit.
on se sentait nus dans les couloirs
la broyeuse a besoin de corps
jeunes ou vieux, habillés de sacs, la viande dehors
j'ai vu un homme sourire en sortant de la gare puis un prêtre a surgi drapé dans sa robe noire comme arrivant d’un autre monde
lui demander quoi ?
les trains attendaient sous le hangar
pas envie de monter derrière ces nez pointus
on pourrit plus vite au soleil